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ma revue de presse journalière
20 avril 2020

EXCELLENT ARTICLE =

Accuser la Chine, ou comment cacher la merde au chat

Le labo d’où tout serait parti en Chine 

Alors que la deuxième vague de la pandémie semble démarrer an Chine et en Corée du Sud, Macron et Trump se sont retrouvés tous les deux ensemble pour accuser la Chine de tous les maux. Voilà Macron qui d’abord nous dit que le nombre de morts évalué par les Chinois chez eux est sans doute faux, une manière pour lui de dire que s’il avait menti comme les Chinois la France serait dans le haut du tableau en matière de lutte contre le coronavirus. Et maintenant voilà Trump qui nous dit que Pompeo va enquêter pour faire toute la lumière sur ce méchant virus qui empoisonne la planète, Pompeo et la CIA déguisés en inspecteur Clouzot ça nous promet des vastes heures de rigolade. Et puis il y a encore le professeur Montagnier, prix Nobel pour ses travaux sur le VIH qui en rajoutait une couche et prétendait que ce virus avait été fabriqué. Evidemment je ne vais pas me mettre à défendre la transparence chinoise, ni même comme certains laisser croire que le régime politique de ce pays est autre chose qu’un système capitaliste autoritaire pour ne pas dire dictatorial. Il est très probable que les Chinois aient menti sur le nombre de leurs décès. Mais ce qui me hérisse le poil c’est plutôt que des menteurs patentés comme Macron et Trump aient le front d’accuser les autres de mensonge pour tenter de masquer leur impéritie. On sait aussi que les Chinois ont rapidement informé l’OMS – boutique qui sans doute ne sert pas à grand-chose – pour éclairer le danger et même partager les codes du méchant virus afin que les autres pays puissent se prémunir au mieux. Si les deux « présidents » français et américains sont à la pointe du combat contre les Chinois, c’est parce qu’ils sont tous les deux en grande difficulté à l’intérieur de chez eux. Trump a de fortes chances d’être battu aux prochaines élections présidentielles[1] – si elles ont lieu – et Macron, menacé avec son gouvernement de multiples procès, n’arrive pas à faire face à l’opinion. Les Etats-Unis et la France sont classés parmi les dix pays les plus dangereux en regard du COVID-19, mais aussi parmi les pays les moins efficaces dans la gestion des malades infectés. On comprend dès lors que d’accuser les Chinois, les fourbes Chinois, c’est un excellent dérivatif pour eux. Mais là où se commence à être cocasse c’est que la France et les Etats-Unis dépendent bêtement de la Chine pour leurs équipements médicaux et pour les médicaments. Depuis quelques jours se répandent des rumeurs selon lesquelles les Etats-Unis feraient défaut sur leur propre dette vis-à-vis de la Chine[2]. On ne sait pas si c’est très sérieux. Mais il semble bien que les Etats-Unis soient aux abois, ayant la dette la plus élevée du monde, et qu’ils ne sachent pas comment faire pour la payer et en générer une autre pour assumer la relance de leur économie. Il va de soi que si les Etats-Unis venaient à faire défaut, ce serait un cataclysme terrible parce qu’ils perdraient leur seule puissance effective, le dollar, qui pour le coup ne vaudrait plus rien. Trump qui est acculé à rendre des comptes sur la gestion catastrophique du virus menace maintenant la Chine des pires représailles. C’est évidemment sa manière à lui d’occuper l’espace de la communication dans la campagne présidentielle, et le fourbe Chinois est un bon client[3]. Bien entendu, il n’a pas précisé le niveau de ses représailles. Mais cette rhétorique pseudo-guerrière risque de faire rapidement long feu, non seulement pour cause de dépendance, mais aussi parce que les Américains ont vu de leurs yeux le délabrement de leur système sanitaire. Cela aura sans doute des conséquences sur la campagne de Joe Biden qui va sans doute gauchir un peu son discours sur la réforme de la santé, ce qui lui ramènera sans doute les partisans de Sanders. 

 

L’Amérique est coincée. C’est même encore pire que ça. Les Etats-Unis viennent de lancer un plan de 2200 milliards de $ pour remettre en route l’économie du pays, soit presque le PIB d’une année de la France. Qu’est-ce que sont ces 2200 milliards ? D’où sortent-ils ? C’est la planche à billets, mais c’est aussi de la dette publique. Qui va bien pouvoir acheter cette dette supplémentaire, sachant que les Chinois en sont les premiers détenteurs depuis des années ? L’endettement étatsunien atteint, je l’ai répété plusieurs fois ici des sommets jamais vu dans l’histoire du monde, et comme en 2008, lorsque les dettes – publiques, privées et celles des ménages – dépassent un certain niveau, cela se traduit inexorablement par une crise financière puis économique. Depuis l’élection de Trump – et sans doute avant, mais c’est plus flagrant avec cette élection – les Etats-Unis vivent en faisant de la cavalerie, de l’endettement. Les rodomontades de Trump sur son supposé nationalisme n’ont pas débouché sur l’ébauche d’un renouveau industriel dans ce pays qui est en retard dans tous les domaines qui assurent un peu de souveraineté à un pays. C’est un peuple de consommateurs essentiellement qui peut exhiber une apparence de richesse parce qu’il maîtrise la monnaie internationale. Le fait que le soi-disant plus riche pays de la planète ait un système sanitaire aussi délabré, inégalitaire et inefficace, montre non seulement la différence qu’il peut y avoir entre richesse et monnaie, mais aussi que la puissance qui sur le long terme ne repose pas sur une puissance industrielle nationale, n’en est pas une. Dès lors il apparait que l’impérialisme des Etats-Unis qui organise les relations internationales depuis disons 1945, est en voie de disparition, et on peut dire que c’est la mondialisation qu’il a encouragée qui se retourne contre ce pays ! Les Etats-Unis n’ont guère de moyens de se faire respecter, autrement qu’en déconnant dans les pays du Tiers-Monde. Ils en sont encore à monter des coups d’Etat médiocres en Amérique latine, sans résultat sensible. 

 

La dette des Etats-Unis détenue par pays, avril 2019 

Certes les Etats-Unis possèdent une armée très puissante – à condition qu’elle n’aille pas au contact et qu’elle reste abritée derrière sa technologie. On l’a vu encore dans ce mini-conflit que Trump a mis en scène avec l’Inde pour se faire livrer des doses de chloroquine. Mais un Empire ne peut pas compter toujours sur son armée. A l’heure actuelle, les Etats-Unis sont dépendants des pays émergents où très souvent leurs multinationales ont délocalisé, pour des produits de première nécessité. Le commerce extérieur est gravement déficitaire et de plus en plus déficitaire, il n’y a jamais eu de résorption du déficit commercial depuis que Trump a été élu. Cet échec total est évidemment devenu flagrant dès los que le coronavirus met en question l’activité économique. Trump n’a jamais pu briser, s’il en a eu l’intention, le cercle de la dépendance financière et manufacturière dans lequel vit le pays qu’il est sensé diriger. Macron est exactement dans le même cas. Il a accéléré volontairement la désindustrialisation du pays, la dégradation des équipements collectifs pour faire basculer la France définitivement dans un capitalisme financier finalement très fragile. Comme le signale le document ci-dessous, c’est une campagne de propagande grande ampleur dans laquelle les Etats-Unis se sont lancés contre la Chine, et Macron jamais en retard d’une imbécilité communicationnelle trouve son intérêt à emboîté le pas au président peroxydé. 

 

Le méchant virus est peut-être d’origine humaine, il se serait échappé du labo de Wuhan, ou peut-être d’un laboratoire américain qui travaillait sans doute sur la guerre bactériologique. C’est une question importante bien sûr. Et peu de gens croient que ce virus se soit développé tout seul et par lui-même, que le pangolin soit fautif. Montagnier a appuyé dans ce sens, mais sans apporter de preuve convaincante[4]. Si l’hypothèse d’une manipulation humaine n’est pas du tout à exclure, rien n’est prouvé, et on voit surtout que cet ensemble de faits plus ou moins précis dénote une volonté de détourner le regard de la France et des Etats-Unis vers la Chine. Les Chinois sont très furieux. L’ambassade de Chine a fait part de cette fureur[5]. En effet selon les classements DKVGlobal/Covid, la Chine apparait comme un des pays qui ont mis en œuvre les stratégies les plus efficaces. A l’inverse les Etats-Unis et la France sont classés parmi les pays les plus dangereux et les moins efficace dans la lutte contre le virus, les USA au second rang derrière l’Italie, mais la France au 5ème rang. Certes les Chinois ont probablement menti sur le nombre de leurs morts, et ils viennent d’en rajouter quelques centaines. Cependant, tout le monde sentait depuis très longtemps que des épidémies en chaîne se préparaient, et en Occident nous avons été désarmés complètement[6]. Une des raisons fondamentales est que nous avons raisonné dans les pays qui se sont convertis au néolibéralisme comme si la santé était un coût, alors qu’elle est un investissement, et pour réduire ce coût, on est passé à l’hôpital d’une logique de stock – masques lits de soins intensifs, respirateurs, etc. – à une logique de flux. C’est le reflexe presque normal des adeptes de la pensée libérale. Réduire les coûts est leur mantra au profit de l’actionnaire. Ne pas comprendre que les investissements publics sont aussi une nécessité pour le marché les conduits à cette aberration mentale, croyant relancer la croissance, ils engendrent la décroissance. Nous y sommes aujourd’hui, mais la décroissance sans préparation, sans plan alternatif est aussi nocive que la croissance infinie et conduit les pays dans des zones de trouble dont on ne voit pas très bien l’issue. 

 

Cependant, qu’on considère le virus comme venant d’une manipulation chinoise ou américaine, c’est bien un des résultats non-paradoxal des progrès de la science. C’est le résultat du progressisme si vous voulez. C’est peut-être le point le plus important. A l’heure actuelle on évoque l’ignoble Bill Gates qui veut vacciner 7 milliards de personnes[7]. Big Pharma est d’accord vous pensez bien ! mais il y a quelque chose de troublant, la science crée un virus la science crée un vaccin. Peu importe que ce virus ait été créé sciemment ou non, personnellement je ne le pense pas. Mais demander à ceux qui ont créé le problème de le résoudre a quelque chose d’incongru. La mécanique qui s’est mise en place pour nous pourrir la vie a été enclenchée par le monde tel qu’il est. D’abord la mondialisation, il va de soi que c’est bien la mondialisation qui est le vecteur de la transmission du virus, via les bateaux de croisière géants ou les avions de ligne. On voit bien dans la situation dans laquelle nous sommes que lorsque les espaces sont cloisonnés, les risques d’exposition sont plus faibles. Ce qui suffirait à justifier en soi l’existence et le renforcement des frontières, mais aussi le développement des formes économiques visant l’autosuffisance des territoires. Le second vecteur du virus est la pollution, on a démontré d’abord que la pollution rendait les personnes exposées plus fragiles face au coronavirus[8]. Mais il y a le fait que la pollution atmosphérique en elle-même porte le virus[9]. On avait remarqué que le Nord de l’Italie bien plus pollué que le reste du pays avait été le premier foyer de l’infection. Tout ça pour dire que la pollution de l’air, de l’eau et de la terre sont les rançons du progrès, c’est bien que celui-ci porte en lui-même ses propres limites. De quelque côté qu’on se penche, on trouve à l’origine de la décomposition du monde l’idée de progrès continue, mâtinée de profits comme vecteur de ce même progrès. Mais le résultat du progrès et du progressisme cher à Macron, est aujourd’hui devant nos yeux : l’air n’est plus bon à respirer, l’eau et la terre sont empoisonnées, l’alimentation impropre à la consommation, et nous sommes malades. Ceux qui en sont à nous dire qu’avant ce n’était pas mieux, se trompent et nous trompent lourdement.  

 

En attendant les pitreries de Macron continuent de plus belle. Un jour il dit blanc et le lendemain noir. Et c’est cette buse qui croit qu’on est aussi bête que lui et que le en même temps passera comme une lettre à la poste. C’est en réalité ce grand écart permanent qu’il fait entre deux mensonges, qui explique pourquoi de s’attaquer à la Chine est pour lui indispensable, ç a sert à masquer son irrésolution. En un mois il aurait découvert ce que nous savions nous depuis au moins le début mars que la France n’avait aucune préparation pour faire face à une pandémie. Rien n’a été fait avant la mi-mars, alors que selon Macron lui-même la Buzyn l’avait mis au courant de l’importance de la déferlante qui arrivait. Il se promenait encore sans masque et incitait les Français à sortir et s’amuser jusque vers le 10 du mois de mars. De maladresse en maladresse, passant du je-m’en-foutisme à l’alarmisme Macron a perdu toute crédibilité. Le monde a publié un sondage qui montre qu’en Allemagne et même au Royaume Uni, il y a tout de même une confiance dans le gouvernement, respectivement 60% et 64%. En France rien de tel, Macron et son gang ne reçoivent le soutien que d’un tiers de la population[10]. Et 84% des Français estiment que l’exécutif devra rendre des comptes ! Il faut dire que depuis que Macron a lancé en rafale ses réformes, il a perdu totalement l’adhésion des Français. Il semble qu’aujourd’hui quoi qu’il fasse, il ne sera plus jamais suivi. C’est ce qui explique pourquoi il s’attaque aux Chinois, c’est une vieille tactique de désigner un ennemi extérieur pour tenter de retrouver l’adhésion de sa population. Dans le même sondage, Le monde révélait que les Français adressaient une critique virulente de la mondialisation et voulaient retrouver leur souveraineté. Cela annonce des jours mauvais pour l’Union européenne qui n’est qu’une autre expression de la mondialisation.



[1] Voir l’interview de Jean Eric Branaa, Marianne, 17 avril 2020 qui rejoint mon point de vue.

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