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ma revue de presse journalière
3 novembre 2018

Excellent !!!

AU VENEZUELA, LES FEMMES GRANDISSENT POLITIQUEMENT

Par : Geraldina Colotti, 30/10/2018

Entretien avec la dirigeante bolivarienne Maria Rosa Jiménez lors du IIème Congrès des Femmes Vénézuéliennes.

Maria Rosa Jiménez (au centre, avec la fillette) et ses compagnes de lutte

En tant que Secrétaire Exécutive des Missions et Grandes Missions, ces programmes sociaux créés par Hugo Chavez et appliqués dans les différents domaines de compétence des ministères correspondants, Maria Rosa Jiménez joue un rôle prépondérant qui lui permet de prendre le pouls de la Révolution Bolivarienne et, en particulier de celui des femmes.

Maria Rosa est aussi secrétaire exécutive du Mouvement “Somos Venezuela” qui organise 287.000 jeunes, en majorité des femmes, en comités de porte-à-porte déployés sur tout le territoire. Ces jeunes se rendent dans chaque famille pour expliquer et mettre en pratique le système de protection sociale conçu par le Président Maduro et approuvé par l’Exécutif, par le biais du Carnet de la Patrie. Elle est aussi présidente de la Grande Mission Logement de la Patrie, destinée à 6 millions de familles  principalement sous forme de versements d’allocations. Ce projet, nous explique Jiménez, est basé sur l’article 10 de la Constitution Bolivarienne approuvée en 1999 qui porte sur la reconnaissance du travail domestique et éducatif des femmes, en le considérant comme un travail social qui génère de la valeur et dont l’Etat doit tenir compte. 

Quelle expérience de la la problématique hommes-femmes t’a apporté ton parcours politique?

La Révolution a dès le début adopté la question de l’égalité entre les sexes comme axe central de sa politique, considérant qu’il était indispensable de lutter pour le respect des droits de la femme, contre la violence patriarcale et pour l’égalité des sexes. Aux yeux de Chavez, le socialisme devait être féministe et pour le rappeler, il a proclamé le 25 octobre journée nationale du socialisme féministe. Dans un modèle de société socialiste, la production sociale doit nécessairement être égalitaire et le travail des femmes au foyer doit être considéré comme une tâche assumée par la collectivité entière et non seulement par la femme. De mon point de vue, les femmes ont grandi politiquement au cours de ce parcours révolutionnaire depuis que Chavez nous a invitées à sortir de la sphère individuelle pour nous transformer en sujet politique s’engageant à élaborer des projets, à défendre la Révolution et la patrie (ou plutôt de la Matrie) et à changer le pays, faisant de notre diversité une richesse. Cette diversité, on peut la constater dans le Congrès actuel auquel ont participé divers organisations et mouvements : de la Plateforme Nationale des Femmes au Mouvement Logement de la Patrie et aux organisations du Grand Pôle Patriotique. Y étaient présentes des femmes des différents partis, des collectifs, des organisations de jeunesses, de la diversité des genres :  toutes constituant un mouvement ample et pluriel faisant preuve d’une grande responsabilité du fait que malgré ses différences, il soutient  en permanence la révolution dans les communautés. Ceci est très important.

Nous nous retrouvons en tant que sujet en plein milieu d’une bataille d’idées quotidienne que nous menons aux côtés de la révolution bolivarienne. Tout en découvrant que même en étant des leaders politiques, nous pouvons faire l’objet de violences patriarcales, d’abus et de fémicides, ce qui nous amène à réfléchir sur la nature systémique de la violence contre les femmes. Le fait que la lutte politique que nous menons est non seulement destinée à garantir des biens et des services à la population, mais aussi à nous libérer des formes de domination exercées par la société capitaliste, nous amène à réfléchir et à trouver des solutions pour combattre et désactiver cette violence en agissant d’une autre manière, à partir d’un nouveau point de vue et d’une position différente dans la société par rapport au genre.

Quelle est le débat qui a conduit à ce 2ème Congrès et dans quel contexte a-t-il eu lieu?

Je voudrais tout d’abord évoquer quelques épisodes tragiques qui nous ont directement touchées. Dans le Mouvement Logements de la Patrie Eulalia Buroz, nous avons fait l’expérience du fémicide de Celia Silva le 22 octobre de l’année dernière, et plus récemment, de celui de Mayell Hernandez. Ce sont deux indices de l’équilibre qui est en train de s’établir entre la force des femmes et la révolution bolivarienne. Le fémicide de Celia nous a beaucoup marqués, car elle travaillait avec nous dans le Mouvement Logements de la Patrie et luttait pour les droits des femmes. Nous la pleurons et soutenons sa famille. Nous sommes en mesure d’affirmer que justice ne lui a pas été pleinement rendue car même si l’assassin est en prison, le procès portant sur la pénalisation du fémicide n’a toujours pas eu lieu. Cependant, dans le cas de Mayell, le mouvement des femmes s’est mobilisé immédiatement après le fémicide et l’assassin, d’abord relâché, a fini par été arrêté. Mais c’est le Mouvement d’artistes et d’intellectuels dont elle faisait partie qui a contribué à donner de la visibilité au fémicide, en se mobilisant aux côtés des femmes et  en mettant en évidence que le coupable avait agi par haine contre les femmes, pour infliger des sévices à un corps féminin, le rendre vulnérable et le dominer jusqu‘à sa destruction.

Cette présomption de responsabilité de la part des hommes a permis de montrer qu‘il s’agit d‘un fait culturel, d’enclencher un mécanisme juridique et de susciter le débat. Pour notre part, nous avons un président féministe, Nicolas Maduro, qui réclame des projets et des programmes au Mouvement, au Parti, au Gouvernement. La révolution nous donne la possibilité d’organiser des mobilisations de masse, d’agir contre la violence sexiste, grâce à nos actions et contre toutes les formes de maltraitance infligées aux plus faibles que génère le capitalisme. Le crime de fémicide existe juridiquement depuis six ans, mais les directives relative à la lutte contre la violence patriarcale figuraient déjà dans le processus constituant de 1999 et dans la Constitution actuelle. En coordonnant l‘action de l’Etat et celle des mouvements populaires, nous devons convaincre la société de mener une lutte constante pour obtenir un pouvoir politique.  Nous menons nos batailles dans un contexte politique complexe, en plein milieu d’un blocus économique et financier et d’une guerre non conventionnelle imposés par l‘impérialisme. Au cours de l’année 2017, nous avons travaillé sans répit à la mise en place de l‘Assemblée Nationale Constituante et à la préparation des élections.

La guerre économique  a tenté de porter un coup dur aux femmes en les obligeant à s’occuper de problèmes de survie au lieu de s’engager dans des activités politiques. Comment ont réagi les communautés?

Depuis la disparition physique de Chavez, nous sommes toujours en deuil de ce qu’il a signifié pour nous. Nous avons pleinement conscience de la responsabilité qui nous incombe de ne pas trahir son legs. En 2012, lors de sa dernière campagne électorale, j’ai assisté à un évènement qui a eu lieu au stade Aragua. Et je l’ai entendu dire : “Je ne suis pas Chavez, je suis tout un peuple”. C’était un sujet collectif, méthodique et conscient, et il est clair aujourd’hui qu’il était prédisposé à le devenir depuis longtemps déjà.  Je me souviens par exemple du jour où il est venu nous demander, à nous autres étudiants, de consacrer un an à la Révolution en différant nos projets individuels. C’était en septembre 2003, après le coup d’Etat de l’année précédente. Les Missions étaient en train de naître, ainsi que le Front Francisco de Miranda auquel j’appartenais. Nous avons formé un premier groupe qui est parti à Cuba, suivi d’un deuxième. Dès le départ, nous étions surtout des femmes à faire partie de cette force sociale de la Révolution. Chavez commençait déjà à évoquer le Projet d’Intégration de l’Amérique Latine, l’ALBA.

Il ne s’est pas seulement consacré à administrer un Etat, mais aussi à persuader les gens à s’organiser en pouvoir populaire. Qui sommes-nous? Nous sommes les filles et les fils de celle qui se lève à 4 heures du matin pour préparer des empanadas, les filles et les fils de travailleurs, de paysans, nous ne faisons pas partie de la bourgeoisie mais d’un peuple que Chavez a formé. C’est pour cela qu’à la fin de sa vie, après avoir  demandé à ses médecins de le laisser rentrer de Cuba pour transmettre un dernier message à son peuple, il avait dit : “Que personne ne s’y trompe, aujourd’hui nous avons une Patrie”. J’étais alors enceinte de sept mois. J’ai appelé ma fille Alba Lucia. Puis les forces de la droite ont lancé une offensive violente de rue pour anéantir notre identité de peuple et de patrie. Mais nous, après la victoire de la droite au Parlement en 2015, nous avons compris qu’il fallait continuer à agir plus consciemment encore en tant que peuple. Nous avons compris et soutenu les propositions de Nicolas Maduro qui configurent une nouvelle réalité. Comment vivons-nous la guerre économique ? En résistant. Nous avons compris qu’il nous fallait rester unis face dans le projet de Nicolas, un camarade conséquent, qui agit de concert avec son peuple et ses leaders, convaincus de notre capacité à développer notre propre modèle alternatif au capitalisme.

Quels sont les objectifs et les enjeux du Congrès actuel ?

En premier lieu, préciser le modèle de société que nous voulons construire en réponse aux attaques impériales et aux limites du système rentier du pétrole. Un modèle dans lequel la question du genre sera déclinée sous tous ses aspects, la lutte contre le machisme et le système patriarcal y représentant la force centrale de la révolution. En fin de compte nos luttes seront gagnées grâce au travail et aux efforts poursuivis par les communautés populaires.

Source : https://www.alainet.org/es/articulo/196259

Traduction : Frédérique Buhl

URL de cet article : https://wp.me/p2ahp2-4lS

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